Alors que certains pays remettent en cause la stratégie de vaccination de masse (1,2) , et que le variant Delta met à mal ces mêmes stratégies à travers le monde (3) , y compris parmi les pays les plus vaccinés (4) , la région Bruxelloise a décidé, dans un consensus politique de tous bords, de mettre en place un « Covid safe ticket » étendu à tous les restaurants, bars et évènements culturels de moyenne ampleur (5) .
Comme en France, il s’agit, selon les mots même de Rudy Vervoort, d’inciter à la vaccination (en limitant les libertés des non vaccinés). Et pour les secteurs concernés, dont les évènements culturels, de transférer de facto la responsabilité du contrôle et de l’exclusion aux acteurs culturels eux-mêmes, donc de rendre ces derniers agents de la répression sanitaire.
Le débat proposé ici dans cet article n’est pas de questionner l’efficacité des vaccins, ni la pertinence ou non de se faire vacciner, ni le choix individuel consistant à faire confiance à une biotochnologie nouvelle (les vaccins classiques sans ARN messagers n’étant pas disponibles en Europe à l’heure actuelle), mais bien de pointer le dilemme auquel vont être demain confrontés les acteurs réputés « alternatifs » et qui véhiculent des valeurs de liberté : organiser des évènements malgré tout, et se rendre dès lors agents d’exécution objectifs des mesures restrictives et ségrégationnistes édictées par le pouvoir en place, ou assumer leurs valeurs et annuler les évènements.
On relira en souriant l’énoncé du bien mal nommé "Festival des Libertés" du Théâtre National, qui se propose de débattre des « dispositifs de contrôle, de surveillance, de gouvernance confiée aux statistiques et algorithmes », mais…. seulement entre personnes contrôlées et sélectionnées à l’entrée sur base du fameux Covid safe ticket (6) (ce qui aura au moins le mérite de ne pas occasionner de débats trop enflammés).
Plus critique sera la position de lieux réputés libertaires comme le Magasin 4, et encore plus celles de groupes de la mouvance Anarcho-punk (comme par exemple les René Binamé qui s’y produisent régulièrement), dont on se demande comment l’idéologie véhiculée dans les textes des morceaux (résistance à l’état, à la répression, aux forces de l’ordre, au techno-contrôle, apologie de l’auto-détermination) sera compatible avec l’organisation de concerts qui excluront une partie de son public sur base d’un flicage à l’entrée.
Car ne nous leurrons pas ; au-delà du débat d’aujourd’hui, c’est bien la crédibilité de ces lieux et de ces groupes qui se joue sur le long terme. Si le Bal des Vaccinés a lieu, il s’agira d’une fracture durable pour les milieux militants, que l’on soit vacciné ou non. A méditer.
2. Nous avons choisi dans cet article de ne référencer que des médias « main stream » afin de ne pas nous faire taxer à priori de complotistime, de confusionisme, d’extrémisme, ou de tout autre discours visant à discréditer d’emblée le propos.
6. https://www.festivaldeslibertes.be/2021/fase6?event=21000&___Prelaunch_2021__#21000