Sur la bête enfin achevée
Longtemps les rabatteurs devisent.
Que n’était-elle exterminée
Avant d’entrer dans la remise
Et d’y décimer le troupeau ?
Bête immonde et venue de loin
Détruire et troubler le repos
Des honnêtes bergers du coin,
Que l’avait-on laisser passer
Le gué, la haie et le remblai
Qui séparent un village avisé
D’un pays inculte, sans blé ?
Mais, fit-on remarquer, la bête
Etait d’ici, du Gévaudan
Puisqu’un fléau que rien n’arrête
Envoyé par le Tout Puissant
Ne peut punir que ceux qui fautent,
Infidèles au Roi, à Dieu,
Aux saints, ajoutaient les dévotes
Et tous pensaient à Grandrieu
Où s’était commis adultère,
Blasphème et incivilité.
De tant de pêché sur nos terres
Le diable se félicitait.
Tout changer, pensait le curé
Rétablir une autorité
Ainsi d’un mal sortirait
Le Bien et la félicité.
D’une fenêtre le Marquis
Voyait ses gens dans l’amendement
Et prêts pour le moment requis
D’ouïr à son commandement.
Dresser des bêtes, pensa-t-il
Voilà ce qui serait sensé
Pour que sur des vétilles
Toujours les yeux soit concentrés
Et le ressentiment monté
Contre les provinces voisines
Masquerait l’impôt redouté,
La disette et la famine.