Yahia Gouasmi, le fondateur du Centre Zahra France et Jamel Tahiri s’expriment devant des journalistes devant les locaux de l’association à Grande-Synthe, dans la banlieue de Dunkerque, le mardi 2 octobre 2018.
Yahia Gouasmi, le fondateur du Centre Zahra France et Jamel Tahiri s’expriment devant des journalistes devant les locaux de l’association à Grande-Synthe, dans la banlieue de Dunkerque, le mardi 2 octobre 2018.
En visant le Centre Zahra France fondé par Yahia Gouasmi, l’opération de mardi s’attaque à un relais d’influence de la République islamique d’Iran en France. Association à vocation religieuse mais aux engagements très politiques, le Centre Zahra se trouve depuis près de dix ans au carrefour de la défense des intérêts iraniens dans l’Hexagone et de divers réseaux d’extrême droite et identitaires, rassemblés sous la bannière d’un « antisionisme » virulent.
La connexion iranienne
Le fondateur du Centre Zahra qui compte parmi les personnes dont les domiciles ont été perquisitionnés mardi, Yahia Gouasmi, ancien boucher halal du Nord. Français d’origine algérienne converti à l’Islam chiite, il est proche des autorités iraniennes.
En 2005, il fonde le Centre Zahra à Grande-Synthe dans la banlieue de Dunkerque. Les locaux installés dans un corps de ferme rénové sont le siège de la Fédération chiite de France. La vocation religieuse de l’association laisse une large place à des activités de propagande « antisioniste » outrancière.
Le Centre Zahra est aligné sur les prises de position de la République islamique d’Iran et du Hezbollah, organisation chiite libanaise alliée à Téhéran.
Les liens avec l’extrême droite radicale
M. Gouasmi a accédé à une relative notoriété à la fin des années 2000 après la fondation du Parti antisioniste, une organisation hébergée dans les locaux perquisitionnés mardi. Aux élections européennes de 2009, il associe son parti à une liste électorale emmenée par le polémiste transfuge du Parti communiste et du Front national Alain Soral et l’humoriste Dieudonné qui occupe déjà les marges de la scène publique du fait de ses prises de position antisémites.
Une nébuleuse prend alors forme autour de ces personnalités dont le seul point commun est de faire profession d’« antisionisme ». Outre les réseaux liés aux personnalités de MM. Soral et Dieudonné, s’y est greffé Kémi Séba, fondateur du mouvement identitaire la Tribu Ka, dissous en 2006 pour incitation à la haine raciale et antisémitisme. Son discours mêle à un romantisme de la pureté de la race noire, des références mystiques à l’Egypte ancienne et des louanges au Hezbollah. Des personnalités négationnistes comme Robert Faurisson rejoignent le mouvement.
« L’antisionisme » proclamé à tout-va par ces personnalités cimente un discours antisémite et conspirationniste jusqu’à l’absurde. Ainsi, en 2009, Yahya Gouasmi partageant avec Dieudonné et Alain Soral la scène du Théâtre de la Main d’or à Paris s’illustrera en déclarant au milieu d’une tirade prononcée dans un français approximatif : « derrière chaque divorce, il y a un sioniste. »
Gouasmi, Ahmadinejad et Dieudonné
Yahya Gouasmi ne tardera pas à faire profiter ses nouveaux alliés de ses contacts avec les autorités iraniennes. Il est présent aux côtés de Dieudonné lorsque, lors d’un voyage en Iran, l’humoriste français rencontre une première fois le président iranien d’alors, Mahmoud Ahmadinejad en 2009 en présence de M. Gouasmi.
Lorsque la nébuleuse « antisioniste » se fissure en 2014, les rivalités entre ses différents membres font émerger des accusations de détournement de fonds impliquant l’hypothèse d’un financement iranien de la liste antisioniste de 2009.
Le Centre Zahra n’occupe plus le terrain de l’activisme politique depuis que les relations se sont distendues entre Yahya Gouasmi et ses anciens alliés. Il alimente toujours sur les réseaux sociaux une propagande religieuse chiite version République islamique d’Iran. Sa chaîne Youtube compte 8 700 abonnés.
Elle diffuse régulièrement les prêches d’un certain cheikh Jamel Tahiri qui se présente comme un religieux chiite éduqué dans la Beeka, un bastion libanais du Hezbollah. Les autres contenus relèvent de discours conspirationnistes hostiles à Israël, aux Etats-Unis et à l’Arabie saoudite ou de questions religieuses. L’alignement de l’organisation sur les positions iraniennes est intact.