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100 ans de décadence du capitalisme

posté le 11/02/14 par Un sympathisant du CCI Mots-clés  réflexion / analyse 

Depuis un siècle, nous nous trouvons à un nouveau carrefour dans l’histoire de l’humanité. La classe révolutionnaire a très tôt déjà et avec une clarté aiguë qualifié cette époque charnière avec la formule : "socialisme ou barbarie". La lucidité de l’analyse marxiste que recèle ce slogan et qui s’exprime en lui, ne doit cependant pas être réduite à une formule creuse. C’est pourquoi, nous tenons à en souligner ici brièvement l’importance historique et la profondeur essentielle. En nous penchant sur les origines obscures et dissimulées du genre humain, nous ne pouvons qu’être stupéfaits et impressionnés par les étapes considérables qui ont permis à l’Homme d’opérer son émergence du monde animal et qui ont suivi cette émergence : les langues, l’écriture, les danses, l’architecture, la production d’une profusion de biens, sa capacité à se référer à la diversité et à la profondeur des besoins moraux, culturels, intellectuels et à la valeur de ces besoins, tout cela reflétant une richesse culturelle et une accélération de l’histoire qui nous fait frémir. Mais si nous portons notre attention sur les différentes époques de l’histoire humaine, nous devons aussi reconnaître qu’il n’y pas eu, et qu’il n’y a pas de développement continu et progressif. Encore plus dramatiquement, après l’avènement des sociétés de classes et la naissance des grandes "cultures" nous devons conclure que presque toutes ces dernières ont irrémédiablement disparu et que seules quelques-unes se sont transformées en quelque chose de nouveau. Nous constatons de nombreuses époques de régression culturelle et d’oubli des acquis, généralement accompagnées d’un abrutissement moral des hommes et de la brutalisation énorme des rapports humains. A la base des progrès accomplis par l’espèce humaine réside sa capacité à transformer la nature en vue de la satisfaction de ses besoins, en premier lieu matériels, et dans sa capacité à améliorer et développer ses moyens et techniques de production, ce que Marx appelle les "forces productives". C’est fondamentalement le degré de développement de ces forces productives et la division du travail qu’elles impliquent qui déterminent la façon dont s’organise la société pour les mettre en œuvre, les "rapports de production". Lorsque ces derniers constituent le cadre le plus adéquat au développement des premières, la société connaît un épanouissement, non seulement sur le plan matériel mais aussi sur le plan culturel et moral. Mais lorsque ces rapports de production deviennent une entrave à la poursuite du développement des forces productives, la société connaît des convulsions croissantes et se trouve menacée par la barbarie. Pour ne prendre qu’un exemple historique : un des piliers de l’Empire romain était l’exploitation des esclaves, notamment pour les travaux agricoles, mais lorsque de nouvelles techniques agricoles ont fait leur apparition, elles ne pouvaient être mises en œuvre par des producteurs ayant un statut de bétail ce qui constitue une des causes de la décadence et de l’effondrement de cet Empire.

Aujourd’hui, nous pouvons voir l’éclat des grands bonds culturels,1 de la révolution néolithique,, jusqu’à la Renaissance, l’Humanisme et la Révolution russe comme un prélude à la révolution mondiale. Ces bonds culturels sont à chaque fois le résultat de longues périodes de lutte, où les nouveaux rapports sociaux devaient triompher des anciens. Ces grands bonds culturels nous portent vers le prochain saut : la première socialisation mondiale consciente, le socialisme ! Le marxisme, la théorie dont s’est doté le prolétariat dans son combat contre le capitalisme, a la capacité de porter un regard lucide et non mystifié sur l’histoire et de reconnaître les grandes tendances de celle-ci. Cela ne signifie pas qu’il peut lire le futur dans une boule de cristal. Nous ne pouvons pas prédire quand se produira la révolution mondiale, ni même si elle pourra effectivement avoir lieu. Cependant, nous devons défendre et comprendre en profondeur, contre toutes les résistance et incompréhensions qui affectent même certains révolutionnaires, l’énorme importance historique que constitue l’entrée du capitalisme dans sa décadence. L’alternative devant laquelle nous nous trouvons depuis 100 ans peut se résumer ainsi : soit effectuer le prochain saut social et culturel, le socialisme soit la barbarie. La gravité de cette alternative est plus dramatique qu’à n’importe quelle époque connue jusqu’à aujourd’hui du fait que l’accroissement des contradictions entre les forces productives et les rapports de production ouvre la possibilité non seulement du déclin social et culturel, mais de la destruction totale de l’espèce humaine. Pour la première fois dans l’histoire, la question de l’existence-même de l’espèce humaine est en cause dans la décadence d’un mode de production. En même temps, il existe des possibilités historiques immenses pour un développement ultérieur : l’entrée dans la "véritable" histoire consciente de l’humanité. Le modèle capitaliste de socialisation est celui qui a connu la plus grande réussite dans l’histoire de l’humanité. Le capitalisme a absorbé en lui tous les milieux culturels des autres sociétés (pour autant qu’il ne les ait pas détruits) et a créé pour la première fois une société mondiale. La forme centrale de l’exploitation est le travail salarié, permettant l’appropriation et l’accumulation du surtravail dont l’appropriation gratuite du travail coopératif énormément productif, du travail associé, socialisé. C’est ce qui explique l’incomparable explosion technique et scientifique liée à l’histoire de la montée du capitalisme. Mais l’une des particularités de la socialisation capitaliste c’est qu’elle s’est réalisée de façon inconsciente, déterminée par des lois qui, si elle sont l’expression de rapports sociaux déterminés, l’échange force de travail contre salaire, entre les producteurs et les détenteurs des moyens de production, se présentent comme "naturelles", "immuables" et donc extérieures à toute volonté humaine.. C’est dans cette vision de la réalité mystifiée, réifiée, où les être humains et les rapports entre eux deviennent des "choses", que l’augmentation considérable des ressources matérielles, des forces productives apparait comme un produit du capital et non comme le produit du travail humain. Cependant, avec la conquête du monde, il s’avère que la terre est ronde et finie. Le marché mondial est créé (après la destruction des formes alternatives de production, telles que la production textile chinoise, indienne et ottomane). Même si le succès du mode de production capitaliste constitue une étape progressive dans l’histoire humaine, le saut de la révolution industrielle signifie pour la majorité de la population du centre du capitalisme la destruction des formes de vie existant précédemment ainsi qu’une exploitation féroce.alors que dans de grandes parties du reste du monde, il signifie les épidémies, la faim et l’esclavage. Le capitalisme est sans doute le rapport d’exploitation le plus moderne, mais il est finalement tout aussi parasite que ses prédécesseurs. Pour maintenir en marche la machine de l’accumulation, la socialisation capitaliste nécessite toujours plus de matières premières et de marchés, de même qu’il doit pouvoir compter sur une réserve d’êtres humains contraints de vendre leur force de travail pour survivre. C’est pour cela que sa victoire sur les autres modes de production passait par la ruine et la famine des anciens producteurs.

Le capitalisme se présente comme l’objectif et l’apogée du développement humain. Selon son idéologie, il n’y aurait rien en dehors de lui. Pour ce faire, cette idéologie doit occulter deux choses : d’une part que le capitalisme dépend historiquement au plus haut degré des rapports de production et du milieu extra-capitalistes, d’autre part que la socialisation capitaliste, comme toutes les formes qui l’ont précédée dans l’histoire de l’humanité, n’est qu’une étape dans le processus du devenir conscient de l’humanité. La force motrice de l’accumulation produit en permanence des contradictions internes, qui se déchargent de façon éruptive dans les crises. Dans la phase ascendante du capitalisme, ces crises étaient surmontées par la destruction du capital excédentaire et la conquête de nouveaux marchés. Le nouvel équilibre s’accompagnait d’une nouvelle extension des rapports sociaux capitalistes, mais avec le partage du marché mondial entre les puissances centrales du capitalisme, celui-ci atteint, dans les relations mondiales, une limite. A ce moment-là, les grands États nationaux ne peuvent poursuivre leur conquête du monde qu’en se trouvant face à face ; le gâteau étant entièrement partagé, chacun ne pouvait accroitre sa propre part de celui-ci qu’en réduisant celle des autres. Les États développent leurs armements et fondent l’un sur l’autre dans la première guerre mondiale. Les forces productives enchainées par les rapports de production historiquement dépassés se retournent dans la boucherie mondiale en force destructrice dotée d’un potentiel de destruction incroyable. Avec l’entrée du capitalisme dans sa décadence, la guerre devient une guerre de matériels soumettant l’essentiel de la production aux besoins militaires. La machine aveugle de destruction et d’anéantissement entraîne le monde entier dans l’abîme. Bien avant 1914, la gauche de l’Internationale socialiste, les forces révolutionnaires autour de Rosa Luxemburg et de Lénine, ont pris en main de toutes leurs forces la lutte contre la menace du massacre impérialiste. Le marxisme vivant, c’est-à-dire le véritable marxisme, qui n’est pas enfermé dans des dogmes et des formules toutes faites valables de tout temps, a reconnu qu’il ne s’agissait pas d’une nouvelle guerre entre les États-nations, semblable aux précédentes, mais que celle-ci marquait l’entrée dans la décadence du capitalisme. Les marxistes savaient que nous étions à une croisée des chemins historique (où nous nous trouvons toujours), qui menace pour la première fois de devenir une lutte pour la survie de l’espèce entière. L’entrée du capitalisme dans sa décadence il y a 100 ans est irréversible, mais cela ne signifie pas l’arrêt des forces productives. En réalité, ces forces sont tellement entravées et comprimées par la seule logique de l’exploitation capitaliste que le développement de la société est aspiré dans un tourbillon de plus en plus barbare. Seule la classe ouvrière est capable de donner à l’histoire une direction différente et de construire une nouvelle société. Avec une brutalité inimaginable jusqu’alors nous avons connu la tendance pure de la barbarie capitaliste après la défaite du soulèvement révolutionnaire des années 1917-23. Le cours à une autre guerre mondiale était ouvert, les hommes ont été réduits à des numéros et des matricules, enfermés dans des camps en vue d’une exploitation meurtrière ou de leur assassinat pur et simple. Les meurtres de masse staliniens ont été surpassés par la folie exterminatrice des nazis mais la bourgeoisie "civilisée" elle-même n’a pas voulu rater ce rendez-vous de la barbarie : ce fut l’utilisation de la bombe atomique "démocratique" rasant deux villes deux villes du Japon et infligeant aux survivants d’horribles souffrance. La machine de l’État capitaliste n’a « appris » de l’histoire que dans la mesure où elle s’interdit à elle-même l’autodestruction (la bourgeoisie ne va pas tout simplement se suicider pour laisser la scène de l’histoire au prolétariat), mais c’est seulement le retour de la classe ouvrière après 1968 qui offre une garantie contre le cours ouvert à la guerre. Cependant, si la classe ouvrière a pu barrer le chemin d’un nouvel holocauste mondial, elle n’a pu, pour autant imposer sa propre perspective. Dans cette situation, où aucune des deux classes déterminantes de la société ne pouvait apporter de réponse décisive à une crise économique irréversible et de plus en plus profonde, la société a connu de façon croissante un véritable pourrissement sur pieds, une décomposition sociale croissante rendant encore plus difficile l’accession du prolétariat à une claire conscience de sa perspective historique, une perspective qui était largement répandue dans ses rangs il y a un siècle.

Il y a cent ans et depuis lors, la classe ouvrière a été confrontée à une tâche historique énorme. La classe du travail associé, la classe ouvrière, en tant que porteuse de l’ensemble de l’histoire de l’humanité, en tant que classe centrale dans la lutte pour l’abolition des classes, doit s’élèver contre cette barbarie. Dans la lutte contre la barbarie nihiliste et amorale du capitalisme, elle est l’incarnation de l’humanité prenant conscience d’elle-même. Elle est la force productive encore enchaînée de l’avenir. Elle recèle en elle le potentiel d’un nouveau bond culturel. Dans la lutte contre l’entrée en décadence du capitalisme toute une génération de révolutionnaires est apparue au plan mondial pour opposer à la socialisation dénaturée et réifiée du capitalisme l’association consciente de la classe ouvrière – guidée par le phare de l’Internationale Communiste.

Avec la révolution russe, elle a pris en main la lutte pour la révolution mondiale. Cette grande tâche d’assumer sa responsabilité pour l’humanité reste toujours pour nous, près de 100 ans après, électrisante et enthousiasmante. Cela montre que même face à la menace d’abrutissement s’élève une indignation morale au cœur de la classe ouvrière, qui est encore une boussole pour nous aujourd’hui. La classe ouvrière souffre avec l’ensemble de la société sous le fardeau de la décadence. L’atomisation et l’absence de perspective attaquent notre propre identité. Dans les confrontations à venir, la classe ouvrière démontrera si elle est capable de reprendre à nouveau conscience de sa tâche historique. C’est peut-être une courte étape historiquement que de passer de l’indignation morale à la politisation de toute une génération. Un nouveau bond culturel dans l’histoire de l’humanité est possible et indispensable, c’est ce que nous enseigne l’histoire vivante.

Courant Communiste International - http://fr.internationalism.org

1 Soyons clair que nous regroupons sous le terme de "culture" tout ce qui fait une société donnée : sa façon de se reproduire matériellement, mais aussi l’ensemble de sa production artistique, scientifique, technique, et morale.

Et :

L’année 2014 verra les commémorations officielles de la Première Guerre mondiale.

Les porte-paroles de la classe dirigeante, les politiciens et les professeurs, la télévision et les journaux, iront de leurs explications sur le conflit et pourquoi il a pris fin, de leurs déclarations attristées pour les morts, de leurs propres espoirs pour qu’une telle tragédie ne se reproduise pas. Mais tout cela n’est que l’hypocrisie répugnante d’une classe qui dirige le système même qui nous a apporté les horreurs de cette guerre et de toutes les guerres qui ont ravagé le monde depuis lors.

Les révolutionnaires ont leur propre méthode pour expliquer les tragédies du siècle dernier.

En 1914, l’humanité était face à une alternative : Révolution ou guerre, Socialisme ou barbarie ? Elle est face à la même alternative aujourd’hui.

1914 : Les grandes puissances enrôlent les masses. La propagande de tous les États belligérants proclame : votre pays a besoin de vous. Se battre pour la patrie. Défendre la civilisation contre la barbarie de l’autre camp. Mais comme la révolutionnaire allemande Rosa Luxemburg le disait dans la brochure de Junius, écrite en prison en 1915 : cette guerre est la barbarie. Ce n’est pas une guerre pour mettre fin aux guerres, mais elle exprime la fin définitive de l’utilité du capitalisme pour l’humanité. Si les exploités et les opprimés de tous les pays ne s’unissent pas contre les exploiteurs et les marchands de canon dans tous les pays, cette guerre ne sera que le prélude à des massacres encore plus terribles.

1917-19 : victimes de massacres inutiles dans les tranchées, de la faim et de l’intensification de l’exploitation à l’arrière, les travailleurs des deux camps se rebellent contre la guerre. Soldats et marins se mutinent et fraternisent, les travailleurs organisent des manifestations et des grèves massives. La révolution éclate en Russie lorsque les soviets – conseils révolutionnaires de délégués des travailleurs, des soldats et des paysans - prennent le pouvoir. Elle éclate en Allemagne lorsque les marins de Kiel refusent de se sacrifier pour l’effort de guerre et que les conseils d’ouvriers et de soldats surgissent dans tout le pays. Les classes dirigeantes, qui hier s’entre-égorgeaient, s’unissent pour mettre fin précipitamment à la guerre. Mais la vague révolutionnaire se poursuit face à la misère de l’après-guerre, donnant lieu à davantage de grèves massives et de soulèvements, de Clydeside à Seattle, de la Hongrie au Brésil.

1920-27 : la défaite et la contre-révolution. Les révolutionnaires russes savaient qu’ils étaient condamnés si la révolution ne s’étendait pas à travers le monde. Et malgré l’essor mondial de la lutte des classes, malgré la fondation de l’Internationale communiste, nulle part ailleurs les travailleurs ne parviennent à prendre le pouvoir. Épuisée par la guerre civile dans laquelle les forces contre-révolutionnaires ont été soutenues par les grandes puissances, la classe ouvrière en Russie perd son emprise sur le pouvoir et une nouvelle bureaucratie émerge sur les cendres de la révolution. Staline proclame "le socialisme dans un seul pays" en 1924 : pas un programme pour la révolution mondiale, mais pour le capitalisme d’État russe. En 1927 en Chine, les communistes qui avaient pris part à l’insurrection de Shanghai sont décapités dans les rues par leurs soi-disant "alliés", les nationalistes. En Allemagne, le parti social-démocrate, devenu un parti de l’ordre, a utilisé les forces de l’extrême droite comme troupes de choc contre la révolution. L’extrême-droite incarnée par Hitler s’apprête alors à finir le travail.

1929 : la Grande dépression. L’absurdité et l’obsolescence du capitalisme sont prouvées une fois de plus alors que ferment les usines et que des millions de travailleurs sont jetées à la rue. C’est une crise de surproduction, une crise de la demande alors que l’abondance existe potentiellement. Mais la classe ouvrière a été vaincue et ne peut pas répondre à la crise par la révolution.

1936 : Hitler et Staline dirigent des régimes s’appuyant sur les camps et les prisons, des économies orientées vers la guerre. Les "démocraties" leur emboîtent le pas. La marche vers une nouvelle guerre mondiale est ouverte, qui sera fondamentalement une répétition de la Première. En Espagne, la classe ouvrière n’a pas perdu sa combativité. Mais après avoir mis en échec le coup d’État franquiste en juillet 1936, avec ses propres méthodes de lutte – grèves et fraternisation avec les troupes, elle est happée dans le front antifasciste, qui subordonne les intérêts de classe ouvrière à l’intérêt national. L’Espagne devient un champ de bataille entre les blocs impérialistes, une répétition générale pour la Seconde Guerre mondiale.

1939-45 : malgré tous les nouveaux slogans de ralliement idéologiques – l’antifascisme, la défense de la démocratie ou de la "patrie socialiste "– la Seconde Guerre mondiale surpasse de loin la Première dans la barbarie. Du côté fasciste, le summum est l’extermination industrielle dans les camps de concentration. Mais le champignon atomique sur Hiroshima et Nagasaki montre que les alliés "démocratiques" ne sont pas moins prêts à liquider des millions de vies innocentes.

1945-68 : Une poignée d’internationalistes condamne la guerre comme un nouveau partage du globe, et alors qu’elle touche à sa fin, des révoltes sporadiques de la classe ouvrière éclatent. Mais l’ombre de la défaite est encore trop puissante, et déjà avant la fin de la Seconde Guerre mondiale, les contours du troisième conflit prennent forme. L’URSS, hier alliée contre le fascisme, devient le nouvel ennemi totalitaire. Deux énormes blocs impérialistes se forment et s’affrontent par le biais de guerres par procuration : Corée, le Moyen-Orient, l’Inde et le Pakistan, Cuba, Vietnam...

1968-89 : la réorganisation de l’économie mondiale pendant et après la guerre permet au capitalisme de sortir de la dépression et, malgré la persistance de la pauvreté dans le monde "sous-développés", les pays centraux connaissent une période de croissance et de prospérité. Mais le répit n’est que temporaire et, à la fin des années 1960, les signes d’une nouvelle crise économique font leur apparition sous la forme d’une inflation galopante et, en 1973, d’une nouvelle récession mondiale. Cette fois, cependant, une nouvelle génération de la classe ouvrière commence à répondre à la crise : 10 millions de grévistes en France en 1968, "l’automne chaud" en Italie en 1969, la grève des mineurs en Grande-Bretagne en 1972 et 1974. Ces foyers de révolte et d’autre encore réfutent les idéologues qui avaient proclamé que la classe ouvrière avait été intégrée à la société de consommation. La classe ouvrière n’est pas seulement vivante, mais son refus d’obéir aux diktats de l’économie nationale signifie aussi que le capitalisme n’a pas carte blanche pour intensifier ses affrontements impérialistes au niveau d’une nouvelle guerre mondiale.

1989-2014 : ce problème de la classe dirigeante est illustré le plus clairement avec l’effondrement de l’URSS et du bloc russe. Les grèves massives des ouvriers polonais dans les années 1980 indiquent que les dirigeants de ce bloc ne pourraient pas compter sur le soutien de la classe ouvrière au cas où ils essaieraient de répondre à leurs difficultés économiques profondes en lançant une nouvelle offensive impérialiste. Avec la disparition de "l’Empire du mal" de l’est, George Bush père déclare l’avènement d’un nouvel ordre mondial de paix et de prospérité. Presque immédiatement après, les guerres dans le golfe et l’ex-Yougoslavie montrent que les conflits impérialistes n’ont pas disparu, mais qu’ils ont pris une forme nouvelle plus chaotique, hors de la discipline des anciens blocs. Le continent africain et le Moyen-Orient font l’objet de toute une série de batailles meurtrières. En ce qui concerne la prospérité, la "crise de la dette" de 2008 expose le caractère artificiel de la phase précédente de "croissance". Depuis les années 1930, le capitalisme a réagi à la maladie de la surproduction au moyen du médicament de la dette, mais aujourd’hui la cure montre qu’elle est aussi dangereuse que la maladie. Et pendant ce temps, le capitalisme forcené a besoin de croître coûte que coûte et quel que soit le résultat d’une méthode qui porte avec elle une nouvelle expression de son impasse historique : la crise écologique. La pollution et la destruction de l’environnement, le dérèglement climatique commencent à donner lieu à une série de catastrophes qui ne constituent qu’un avant-goût de ce qui peut se produire si on permet à l’accumulation capitaliste de se poursuivre.

Le capitalisme se décompose sous nos yeux. La classe ouvrière n’a pas été en mesure de développer ses luttes de la période 1968 - 1989 vers une mise en question consciente du mode de production capitaliste, et elle doit faire face au danger d’être entraînée dans le bourbier d’un ordre social dans un état très avancé de décadence – dans sa guerre des gangs, son désespoir, son irrationalité et sa dynamique vers l’autodestruction. Mais la voix du prolétariat n’a pas été réduite au silence. Un sentiment croissant d’indignation contre un système qui leur n’offre aucun avenir a poussé des millions de jeunes dans les rues en Tunisie, Egypte, Grèce, Israël, Espagne, Grande-Bretagne, États-Unis, Turquie et Brésil. Il y a eu des grèves énormes de travailleurs au Bangladesh et en Chine contre l’exploitation impitoyable exigée par le "capitalisme globalisé". En Afrique du Sud, la répression dirigée par le gouvernement contre les mineurs de Marikana dément tous les discours sur la "nouvelle Afrique du Sud" qui a suivi le régime d’apartheid. La classe ouvrière est plus globale que jamais, et même si elle ne parvient pas facilement à récupérer son identité de classe et la confiance en ses propres capacités, la dynamique de ses luttes contient toujours la possibilité de répondre à la barbarie du capitalisme avec la perspective du socialisme, de la révolution communiste qui remplacera la domination du capital et de son État par une nouvelle communauté humaine à l’échelle mondiale.


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