Vous devriez avoir une meilleure hygiène de vie m’a dit mon médecin. Mon médecin dit toujours la même chose. Depuis qu’il sait que je fume des clopes, sa réponse est toujours la même. « Vous devriez arrêter de fumer et bla et bla et bla. » Un mal de tête ? La clope ! Une grippe ? La clope ! Une gingivite ? La clope, la clope, la clope ! S’il n’y avait que mon médecin ça irait. Mais, en plus de ça le moindre paquet de tabac que j’achète se sent obligé de me prédire un avenir atroce. Au boulot, le service prévention est venu nous expliquer qu’au-delà d’un verre d’alcool par jour, il faut se considérer comme alcoolique. Et que l’alcool c’est quand même vachement dangereux, surtout si vous fumez des clopes. En sortant du boulot, accablé de morale, une immense campagne de sensibilisation contre le gras s’impose à mon regard ; sournoisement placé à coté de publicités où s’étalent, insolents, des mannequins aux plastiques parfaites. « Ne mangez ni trop gras ni salé ni trop sucré » et bla et bla et bla. J’entre dans le souterrain du métro, de la publicité encore. Une affiche basic fit orange, qui fait ton sur ton avec l’orange criard des rames m’intime : « Faites du sport ! Soyez en forme ! ». Le métro arrive, le wagon est bondé. Je regarde en l’air pour éviter de croiser le regard des gens. Des pubs, des pubs, des pubs « drinken beu ? belt op…et bla bla bla… » « Infor drogue : la drogue est un fléau, nous pouvons vous aider à arrêter. » J’ai l’impression que toutes ces affiches me donnent des ordres. Le métro s’arrête « cher voyageurs en raison d’un problème sur la ligne et bla et bla et bla. » Stib de merde. Je descends ; je sors. Je m’enfile deux Marlboro light d’affilée. Depuis que mon médecin m’a conseillé de diminuer la clope, je fume des marlboro light. Du coup pour avoir une simple sensation de satiété en nicotine, j’en fume deux fois plus. Merci docteur. Cette ‘journée de mert’ commence à gravement me faire chier. Je marche le long de la rue, les klaxons m’assourdissent, les camions m’agressent les narines par litre fluide et diffus. Encore une clope. Merde ! J’arrive enfin à la maison, après trente minutes de marche. Dans le frigo une bière bien fraiche m’attendait amoureusement depuis la matinée. Pssscht ! Première gorgée, premier plaisir de la journée depuis le café de ce matin. Le médecin m’a pourtant dis, « vous savez monsieur, avec le café avec la cigarette en plus de…et blablabla. » M’en fout, ce soir se sera pizza au gluten ! « En plus avec votre cholestérol blablabla » Ta gueule ! J’allume la télé dans l’espoir de regarder un truc bien bien con, au moins aussi con que cette connerie de journée. Le télé-achat : « Avec artishow désintoxiquez-vous… et bla et bla et bla » Je donne un immense coup de pied dans cette télé de merde. Je termine ma canette en quelques gorgées. J’en veux une autre. Rien à foutre. Je descends au paki racheter un pack de maes et deux pizza quatres formages everiday pour le prix d’une ! En sortant un petit gars en lacoste m’accoste « faut pas de la beuh frangin ? » Ça doit faire dix ans que j’ai pas fumé un joint. J’achète un dix euros. Je remonte chez moi. Je fous la musique ; les klaxons dehors la couvrent à moitié, je mets plus fort. Encore une bière. J’essaye pitoyablement de rouler un joint. Je finis par réussir à fumer un truc tout cabossée qui embaume directement le misérable deux pièce où git cette saloperie de télé que je n’ai même pas finis de payer. Je lui refous un coup de pied au passage. Hahaha ! Putain je suis def. Putain c’est bon ! Allez encore une bière. J’entends qu’on sonne à ma porte. J’ouvre, titubant un peu, les yeux rouges pivoine. C’est ma vieille connasse de propriétaire qui habite au rez de chaussée. « Vous devriez mettre moins fort, vous savez avec tout ce bruit les gens, de nos jours, deviennent sourds de plus en plus vite. Et puis… » Je craque :
« LAISSEZ NOUS CREVER EN PAIX MERDE. »
Groupe Anathème.